Château de Plessier de Roye (Oise)

Les seigneurs de Roye, que l’on voir apparaître à la fin du XIe siècle dans le Cambresis, se fixent à la fin du XIIe dans la région de Noyon. Second fils de Mathieu de Roye, compagnon de Saint Louis à la Croisade de 1270 et frère de l’évêque-duc de Laon, inhumé en 1295 dans l’abbaye de Monchy, Mathieu II de Roye acquiert en juillet 1323 la seigneurie du Plessier et doit avoir tout loisir d’y faire élever un château, puisqu’il meurt seulement au milieu du siècle. Son fils, également prénommé Mathieu, grand-maître des arbalètriers de France en 1346, est capitaine de Compiègne en 1367. Son château du Plessier a résisté en 1358 aux Jacques révoltés, mais il doit lui préférer ceux de Buzancy et de Muret que lui a apportés sa femme, Jeanne de Chérisy - ou Quierzy.
A sa mort, survenue à Muret en 1380, lui succède son fils Jean qui est appelé en 1393 à siéger au Grand Conseil chargé du gouvernement du royaume, en l’absence du roi Charles VI, frappé de folie. Jean de Roye continue à combattre les Anglais, mais trouve la mort en 1396, au désastre de Nicopolis. Mathieu de Roye, son fils, est au nombre des prisonniers d’Azincourt. Libéré moyennant une forte rançon, il hérite des biens de la branche aînée de sa famille, se voit désigné en 1435 par le duc de Bourgogne pour négocier la Paix d’Arras et est inhumé cinq ans plus tard à Ourscamp.
Son fils Jean, seigneur de Muret, de Buzancy et du Plessis, se rallie à Louis XI et c’est en qualité de conseiller et Chambellan du Roi qu’il a l’honneur de le recevoir au Plessis, du 7 au 14 mars 1471. Antoine de Roye, son fils, épouse en 1505 Catherine de Sarrebruck, comtesse de Roucy, et meurt en 1515, tué à Marignan. Quant à Charles, son petit-fils, comte de Roucy et gentilhomme ordinaire de la chambre du Roi, il épouse en 1528 Madeleine de Mailly, fille de Louise de Montmorency, sœur du connétable et belle-soeur de l’amiral de Coligny, maîtresse femme et huguenote résolue, qui n’hésitera pas en 1562 à se rendre à Strasbourg pour négocier l’appui des princes protestants allemands.
Charles de Roye meurt en janvier 1551 en son château du Plessier de Roye. Le 22 juin de cette même année et également au Plessier, sa fille Eléonore épouse Louis de Bourbon, septième fils du duc de Vendôme, qui va hériter cinq ans plus tard de la terre de Condé-en-Brie et prendre le titre de prince de Condé. Cette union scelle l’alliance entre les Bourbons et le parti des Montmorency et des Coligny, dirigée contre les Guises. Converti au protestantisme par sa belle-mère et par sa femme, Louis de Bourbon va en effet prendre la tête des Réformés. Fait prisonnier à la bataille de Dreux, en 1563, il est libéré par Catherine de Medicis, sur l’ntervention de sa femme qu’il trompe bientôt allègrement avec Isabelle de Limeuil, et qui, malade, se retire à Condé où elle meurt en 1564, à 29 ans. Les textes mentionnent en 1565 et 1567 la présence du prince de Condé au Plessier, mais c’est à Vallery qu’il réside ordinairement et c’est à Roucy et à Gandelu que sont nés ses enfants, entre 1556 et 1564.
Après sa mort tragique, survenue en 1569, le soir de la bataille de Jarnac, le Plessier échoit au quatrième de ses fils, Charles, cardinal de Bourbon, archevêque de Rouen, qui rêve un moment de se faire élire roi après la mort d’Henri III. A sa mort, en 1594, il revient à son neveu Henri, troisième prince de Condé, dont les officiers se rendent sur place pour évaluer les réparations à faire au château.
Si l’on en juge par les lignes de leur architecture, les façades de l’édifice donnant sur la cour d’honneur auraient été élevées dans le premier quart du XVII° siècle, selon toute vraisemblance par le prince Henri II de Condé dont Léré a relevé le nom sur la cloche du Plessier, à côté de celui de son épouse, Charlotte de Montmorency, et de la date de 1616. Les travaux doivent être interrompus peu après et la terre vendue vers 1630 à Maximilien de Belleforière que l’on voit alors acheter plusieurs des terres cédées par le prince. Confisquée lors de la condamnation de l’acquéreur, la terre doit finalement être adjugée aux Trudaine.
En 1720, à la mort d’Anne Trudaine, fille de Pierre, trésorier de France à Amiens et dame du Plessier-de-Roye, le domaine échoit à son neveu Claude, capitaine de cavalerie au régiment de la Ferronnays, qui epouse Marie-Thérèse Gineste, fille d’un président à la Cour des Monnaies de Bordeaux, et semble faire du Plessier sa résidence ordinaire. Mis en vente en 1770, il est acheté par Nicolas-Julien de Héricourt, capitaine au régiment du Roi-Infanterie, demeurant ordinairement au château de Canlers, près de Hesdin, qui épouse quatre ans plus tard Elisabeth Roussel de Belloy. Remis en état après la Révolution, le château fait en 1816 l’objet d’un dessin de Léré qui le juge solidement bâti, mais d’une construction tout à fait bizarre, originale et sans aucune régularité.
Rose-Marie de Héricourt, marquise du Grollier, meurt en 1867 au Plessier dont hérite Gaston, son fils ainé, qui a épousé Marie Taupinard de Tilières et meurt en 1908, sans postérité. Charles du Grollier, le cadet, le lègue en 1932 à sa nièce Alix, épouse du comte Samuel du Pontavice et grand-mère de l’actuel propriétaire, le comte Roland du Pontavice du Vaugarny.
Ruiné par les bombardements, mais encore réparable à la fin de 1917, le château sert de poste de commandement et d’observation, face à Lassigny, lors de la bataille du Matz. C’est à partir de ses ruines, dotées de créneaux et de postes de tir, que les marsouins du commandant Reboul parviennent à contrer l’attaque allemande lancée le 30 mars 1918. Finalement tombé aux mains de l’ennemi le 9 juin, le village est définitivement repris le 21 août. A l’entrée de la nef de l’ancienne église, restaurée, mais laissée sans couverture, plusieurs plaques commémorent ces combats acharnés. Les ruines du château n’ont pas été abattues. On reconnaît toujours les fossés maçonnés, les arches du pont dormant, les pavillons d’angle et le portail, la façade sur la cour d’honneur et le départ du grand escalier de pierre, tous criblés d’impacts.
Il s’agissait avant 1918 d’une imposante demeure en pierre dont la construction, demeurée inachevée, avait été vraisemblablement entreprise au début du XVIIe siècle à partir d’éléments plus anciens, conservés dans les façades extérieures. A l’Est, le pignon latéral présentait un gros contrefort orné de sculptures du début du XVIe siècle, et plusieurs fenêtres de la même époque, privées de leurs meneaux de pierre et intégrées dans une sorte de quadrillage formé par des cordons et des pilastres superposés. Sur la tourelle polygonale voisine, les fenêtres en tiers-point remontaient à la chapelle primitive, dont les contreforts avaient reçu des niches à dais Renaissance. Au-delà, certaines travées du corps principal conservaient des moulures d’encadrement caractéristiques de la fin de l’époque gothique. Les façades sur la cour d’honneur, comme le reste de l’édifice, s’inscrivaient dans un ambitieux projet de reconstruction, probablement engagé à la fin du XVIe siècle.
Caractéristiques de l’époque Henri IV- Louis XIII, elles étaient contemporaines du vaste terre-plein rectangulaire servant d’assise au château, de ses fossés soigneusement maçonnés, de ses pavillons d’angle et de son portail monumental. L’aile gauche, en retour sur la cour, abritait les volées d’un bel escalier de pierre. Élevée d’un rez-de-chaussée, d’un piano nobile et d’un troisième niveau correspondant à de hautes fenêtres passantes, elle présentait d’intéressantes façades structurées par des chaînes en saillie, couronnées de frontons courbes chargés d’opulents cartouches et de chutes de fruits en forme de trophées. Plus sobre, la façade du corps de logis présentait une suite de travées séparées par de grands tableaux de pierre. Si l’on considère que la travée de droite, placée en légère saillie, dans l’axe du portail, devait marquer le centre de la composition, on peut mesurer l’ambition du projet.
A l’intérieur, restauré par le marquis du Grollier dans le style historique cher aux architectes de la seconde moitié du XIXe siècle, se succédaient la salle à manger, voisine de l’ancienne chapelle, les grand et petit salons, un second escalier et enfin deux pièces, billard et bibliothèque, occupant l’espace prévu à l’origine pour le vestibule d’entrée. Remaniée, sinon reconstruite au XIXe siècle, la dernière travée avait reçu à cette occasion un toit en terrasse et une façade latérale, l’un et l’autre ornés de sculptures inspirées de la Seconde Renaissance et du maniérisme.

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